Cet après-midi, à la commission des finances, nous auditionnons les deux co-présidents de la commission chargée de réfléchir au grand emprunt, à savoir Michel Rocard et Alain Juppé.
Tous deux rappellent très vite qu’ils ne sont pas enthousiastes face à ce grand emprunt, et même comme le dit Alain Juppé, « nous ne sommes pas les inventeurs du grand emprunt ». Mais de préciser immédiatement : « Nous n’avons pas à savoir s’il est opportun, mais de faire en sorte qu’il soit utile ». On a connu discours plus enthousiaste, en effet !
Les intervenants soulignent que l’idée est que ce soit un emprunt « pas comme les autres », et qu’on ne doit pas oublier la situation des finances publiques. Et tous deux de dire que « cet emprunt n’est utile que s’il s’accompagne d’une volonté politique forte de rétablir les finances publiques ».
L’innovation, elle doit se faire sur la nature des dépenses (doit exclure les dépenses de fonctionnement récurrentes) et sur les modalités de l’emprunt (« Il faut éviter d’abonder les lignes budgétaires des ministères » !). Ils suggèrent que la moitié des propositions repose sur des dotations en capital, prêts participatifs ou en avances remboursables.
La fourchette devrait être entre 20 et 40 milliards d’euros. Quant à savoir s’il faut faire appel à l’épargne publique ou aller sur les marchés, « il appartient au Président de la République de le dire »… Mais nos deux intervenants observent avec malignité que la première solution coûterait plus cher que la seconde !
Quant à l’affectation des sommes, le « fil conducteur » doit être de « contribuer à accélérer l’évolution vers un nouveau modèle de développement par la recherche et l’innovation ». La Commission devrait retenir deux axes transversaux : l’effort sur l’enseignement supérieur et la recherche ; le financement de la PME innovante. Et cinq thématiques : économie numérique, réseaux et infrastructures ; énergies nouvelles et renouvelables ; sciences du vivant (santé, biotechnologies) ; ville durable et territoires (mobilité, amélioration de la performance énergétique) ; véhicules du futur.
Voilà, de manière synthétique, les éléments de présentation de ce grand emprunt tels qu’ils nous ont été présentés à la commission des finances. Ce qui est intéressant, c’est d’entendre la conclusion de Michel Rocard, soulignant que « la France est dangereusement endettée », et espérant que « cet emprunt n’ait pas de successeur ! », car « la dette française atteint des niveaux redoutables ».
C’est ce qu’en effet, je démontrerai dans quelques jours en publiant mon rapport spécial sur les engagements financiers de l’Etat.